Retour sur DECODEX. PAR JACQUES SAPIR · 2 MARS 2017

Publié le par S. Sellami

Alors, bon, au risque de lasser, je vais revenir une ultime fois sur l’affaireDecodex, l’inénarrable Samuel Laurent, et l’honneur, depuis longtemps perdu, du Monde. Je vais le faire pour que l’on ait une vue avec un peu de recul sur cette triste affaire.

 

Non que j’en ai eu à souffrir. En fait, c’est tout le contraire, et je pense que c’est une des explications du silence assourdissant de Samuel Laurent ces derniers jours. Lui, d’habitude si assidu sur mon fil Twitter a complètement disparu. On dit que le ridicule ne tue pas ; j’ajouterai que, parfois, c’est presque dommage.

Mais, puisqu’il ne donne pas de ses nouvelles, je vais donner des miennes, et elles sont plutôt bonnes. Je viens d’avoir les chiffres complets pour le mois de février 2017, que j’ai comparés avec ceux de février 2016, 2015 et 2014.

La première chose que l’on constate, c’est le bond en avant des connexions pour 2017, qu’on le mesure en chiffres bruts, ou en chiffres rapportés au nombre de notes publiées sur RussEurope.

 

Tableau 1

 2017201620152014
Connexion 14 jours1492949067814194166754
Connexions 28 jours276765185436279517116680
Notes25192712
Connexions par notes11070,69759,810352,59723,3

 

Deux effets apparaissent clairement. Même par rapport à février 2015, mois particulier sur lequel nous reviendrons, la hausse de fréquentation est claire sur les 14 premiers jours du mois. Elle se maintient pour l’ensemble du mois, rapportée au nombre de notes qui ont été publiées (+ 7%).

 

Graphique 1

Si l’on regarde le nombre de visiteurs (identifié par l’IP de leur ordinateur) le saut est manifeste, même par rapport à 2015.

 

Tableau 2

 Visiteurs différents
2017123289
201673190
2015105308
201453682

 

Graphique 2

 

Par rapport à 2015 il y a eu 17% de visiteurs en plus en février 2017, et 68% de plus qu’en février 2016.

Il faut alors dire un mot sur le pourquoi du pic de fréquentation de février 2015. L’actualité de ce mois était chargée et, sur les 27 notes publiées dans ce mois, 13 ont été consacrées à la Grèce, qui venait d’élire le premier gouvernement Syriza, et une grosse partie du reste fut consacré au Donbass car, rappelons le, ce fut le moment de la signature des accords de Minsk, accords aujourd’hui largement remise en cause par des forces ukrainiennes. Cela explique, à l’évidence, le nombre des connexions. Par rapport à février 2016, un mois qui fut – relativement tout de même – plus calme (mais on avait les suites des attentats de Novembre 2015 ET le début de la mobilisation contre la « loi travail), l’effet positif de Decodex est encore plus évident.

 

Graphique 3

Ecart de la fréquentation entre 2016 et 2017

 

 

Et cela me ramène à ce cher disparu, Samuel Laurent, sans doute réfugié dans un trou de souris. On se doute bien que l’affaire Décodexn’avait nullement pour but de donner plus de visibilité à des sites que l’équipe des déconneurs du Monde entendait dénoncer. Pourtant, c’est bien à cela qu’elle a abouti. Et plusieurs raisons l’expliquent :

  • D’une part, la méfiance envers tout ce qui vient des médias « officiels ».
  • D’autre part, l’évident parti-pris idéologique de la méthode de tri.

Mais, cela pourrait masquer l’effet le plus pervers de toute cette opération. En se concentrant sur le problème des « fausses nouvelles » et en faisant croire qu’il s’agirait d’un fait nouveau, les déconneurs deDecodex ont commis deux mensonges. Le premier est que la « fausse nouvelle » est aussi vieille que la presse elle-même. Que l’on se rappelle le « bobard » (comme l’on disait alors) qui circulait dans la presse française et britannique en septembre 1914 et qui prétendait que les « vilains » soldats allemands coupaient les mains des enfants belges…Le second est qu’en focalisant sur la « fausse nouvelle », on passe sous silence l’existence de nouvelles qui n’arrivent pas à franchir le mur dressé justement par la presse « officielle ». Le problème véritable n’est donc pas les « fake news » sur lesquelles on disserte à loisir mais les « no news », comme l’explique très bien mon collègue Olivier Berruyer dans le débat que nous avons eu avec Elizabeth Lévy sur ce sujet[1].

Plus généralement, ce n’est pas par des outils aussi truqués queDecodex que la presse officielle, et le Monde en particulier, rétablira sa position et surmontera son discrédit qui vient de l’attitude anti-pluraliste qui a été adoptée depuis le début des années 2000, et en particulier à l’occasion du référendum sur le projet de constitution européenne de 2005. La cause de ce discrédit, qui aujourd’hui va grandissant, est là et nulle par ailleurs. Tant que ces « journalistes » n’auront pas fait leur autocritique, et ne respecterons pas les règles du plus élémentaire pluralisme, il ne pourra en être autrement.

La réputation du Monde a irrémédiablement sombré dans cette affaire, même si la rédaction de ce journal n’a aucune responsabilité directe dans Decodex.

Et l’on peut penser que Samuel Laurent a bien des raisons de se terrer aujourd’hui…

[1] https://russeurope.hypotheses.org/5743

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